Prends garde mon ami, ce livre n’est pas un roman, fruit d’une imagination qui invente là où la science se tait ! Il n’est pas le récit épisodique de faits, compulsés longuement sur des documents patiemment ruminés. Ce livre est vrai. Et cependant des documents nous n’en avons pas. Mais nous savons ce qu’était le culte dans l’assemblée du Peuple saint, l’enseignement donné par la Loi et les Prophètes, et l’ordonnance quotidienne de la famille israélite.
Préface
Oui, nous savons ce qui s’est passé d’une manière plus certaine que si quelque carnet de poche, quelque journal tenu soigneusement et recopié sur un parchemin antique, nous eût livré quelque trait, quelque parole illustrant la vie cachée des gens de Nazareth. Le silence des sources et plus éloquent que la bavardage des chroniqueurs ; cela parce que personne n’avait l’idée, dans les temps antiques, de raconter ce qu’était la vie ordinaire des gens les plus simples, les plus humbles des pauvres de Yahvé.
Sous le rythme des jours et des nuits, des veilles et des travaux, des saisons et des fêtes, s’est formée la Foi parfaite des gloires de l’Humanité qui nous ont donné le Sauveur : Joseph, Marie, Jacob le père de Joseph, Joachim et Anne ; l’Evangile nous a gardé le nom de Jacob… Comment vivaient-ils ? Comment étaient-ils ?
Ils étaient le produit obligé de la liturgie synagogale et de la tradition patriarcale d’Israël. Or cela, nous le savons. Nous savons d’une manière suréminente ce qu’était le culte dans l’Assemblée du Peuple saint, l’Enseignement donné par la Loi et les Prophètes, et l’ordonnance quotidienne de la famille israélite. C’est dans ce cadre immuable, qui enfermait les générations, que s’élaborait pour chacun l’éducation foncièrement religieuse, orchestrée par les fêtes et les sabbats, illuminée par les Hauts Faits de Yahvé, transmise par les pères et les mères à leurs enfants.
Une certaine théologie spéculative a voulu reléguer dans l’abstrait les gloires de Marie : cette vision a échoué, elle n’a rien apporté au monde. La réussite de Marie a paru une exception inaccessible, et la chrétienté est restée sous la sentence : « Tu mourras de mort ! » C’est à l’histoire, au témoignage des faits à prendre la relève. Non pas cette histoire mutilée et trompeuse que le monde retient : celle des guerres et des carnages, des catastrophes sanglantes qui sont la gloire du péché ; mais l’histoire réelle, de la vie la plus ordinaire, que personne n’a pris le soin d’écrire, parce que personne, sur l’heure, n’a soupçonné que les structures ancestrales n’étaient pas immuables et devaient un jour disparaître.
Personne, en effet, ne pouvait prévoir la mutation universelle que le monde est en train de subir, et qui atteint aujourd’hui le niveau de la conscience morale. Dans notre univers concentrationnaire, qui ne connaît plus l’artisanat familial, la lampe à huile, l’âtre du foyer, il est nécessaire de montrer que c’est dans ce style de vie la plus simple, qu’a pris naissance, que s’est développée cette Foi parfaite qui nous a donné le fruit de la Justice : Jésus-Christ.